Table des matières
Astrophotographie
Developpement d'astrophotos, Comparaison de méthodes
Pour faire une bonne astro-photo, il faut maitriser 2 pratiques : la prise de vue avec toute la technicité qu'elle exige, et le traitement des images sur ordinateur (qui n'est pas moins technique, mais différemment)
Principe
Photographier des éléments très peu lumineux nécessite d'avoir un dispositif de capture très sensible et/ou d'augmenter le temps d'exposition.
Sur les APN (Appareil Photographique Numérique), augmenter la sensibilité se traduit par régler les ISO sur une valeur élevée, ce qui conduit à avoir des images très bruitées et avec une dynamique en générale réduite.
Augmenter le temps d'exposition pose également des difficultés : la voute céleste étant en rotation par rapport à la terre, le sujet photographié se décalera dans le temps et une pose longue génèrera des trainées sur les étoiles. On peut en partie compenser la rotation en effectuant un suivi céleste avec une monture équatoriale motorisée (voir partie prise de vue). De plus lors des longues poses, le capteur chauffe et a tendance à générer du bruit.
L'astuce consiste à multiplier les prises de vues “courtes” avec une sensibilité “raisonnablement élevée” et à post-traiter les images en exploitant les techniques du traitement d'image, et notamment le fait qu'une addition d'images contribue à améliorer le rapport signal / bruit. On aura donc au final une image moins bruitée qu'une pose unique longue ou une pose unique à des valeurs d'ISO délirantes.
L'étape finale sera un post-traitement pour tirer le maximum d'information utile de l'image (luminosité, contraste, netteté…)
Prise de vue
ça se passe dehors, dans la nuit (et parfois le froid).
Mise en station
Pour compenser la rotation de la terre, on utilise une monture équatoriale :
Une monture équatoriale est un support de télescope doté de 4 axes (2 pour l'alignement, 2 pour pointer des cibles). L'objectif est d'aligner un axe appelé ascension droite (AD) avec l'axe de rotation de la terre. Il suffit ensuite de motoriser cet axe pour compenser la rotation de la terre.
Il existe des alternatives comme les montures altazimutales: elles sont plus simples car composées uniquement de 2 axes, mais nécessitent une parfaite synchronisation dans la rotation de leur 2 axes pour compenser la rotation de la terre. Pour éliminer une source d'erreur, on préfère les montures équatoriales en ne motorisant un seul axe.
Selon notre position sur la terre, la position apparente de l'axe de rotation de la terre diffère (plus ou moins haut dans le ciel). Il convient donc d'effectuer une mise en station, c'est à dire d'aligner cet axe AD de la monture équatoriale sur l'axe de rotation de la terre en jouant sur les 2 premiers axes :
Pour cela, on peut s'aider d'une étoile particulière, l'étoile polaire. Il se trouve que cette étoile est très proche de l'axe de rotation de la terre. Ce qui signifie qu'elle ne bouge pas dans le ciel au cours de la nuit. Bien évidemment, ce n'est qu'une approximation (ce serait trop facile sinon), qui n'est plus valable si on veut faire de l'astrophotographie, surtout de petits objets nécessitant un fort grandissement.
Dans ce cas, il faut se servir d'un viseur polaire. Il est intégré dans l'axe AD de la monture équatoriale et permet de viser l'axe de rotation de la terre en s'appuyant sur l'étoile polaire et 2 constellations-repères. La position de la polaire par rapport à l'axe de rotation de la terre dépend de l'heure, de la saison, de la position sur la terre…
Plus l'opération de mise en station est réalisée avec précision, meilleur sera le suivi, et plus les poses pourront être longues sans générer de filé d'étoiles.
Autres contraintes sur la monture
De nombreuses autres contraintes viennent rendre l'astrophotographie plus sportive :
- la capacité de charge de la monture: un télescope est lourd à cause d'un optique en verre ou d'un miroir de grande taille qu'on souhaite indéformable. Le poids augmente lorsqu'on rajoute l'APN et les accessoires pour le fixer sur le télescope.
- la qualité du suivi: la rotation est très lente et les moteurs électriques tournent rapidement, il faut adapter la vitesse avec des réducteurs, souvent à engrenages qui sont à l'origine de jeux mécaniques
- la stabilité de la monture: comme pour tout trépied photo, on ne veut pas que l'appareil bouge, même si aux alentours il peut y avoir des sources de vibrations comme des éléphants ou autres astronomes enveloppés dans leurs doudounes qui tapent des pieds par-terre pour se réchauffer
- La prise au vent du télescope peut être à l'origine de vibrations, il faut donc trouver un lieu à l'abri du vent, mais dégagé sinon il n'y plus rien à photographier
- Le froid: qui diminue l'autonomie des batteries et qui use la patience de l'astronome amateur qui veille à des heures pas raisonnables
- …
Capture des images
La mise en station effectuée, il faut ensuite régler l'appareil photo pour prendre les meilleures photos.
Mise au point
La première étape consiste à régler la mise au point. Les objets photographiés étant trop peu lumineux, on ne peut se fier aux mécanismes d'autofocus, passage en manuel obligatoire !
On peut s'aider d'étoiles brillantes, mais celles-ci ressemblent souvent à de minuscules tâches et même avec les zooms des live-view des APN modernes, la tâche n'est pas aisée. On s'aide parfois de masque de diffraction que l'on place devant l'objectif (le télescope). Ces masques génèrent des artefacts de diffraction qu'ils faut parfaitement aligner pour obtenir une bonne mise au point.
ça ne se voit pas très bien, mais seule l'image centrale est bien réglée, sur les autres, la branche centrale de l'étoile de diffraction n'est pas parfaitement centrée. Bon courage pour voir ça sur un mini écran d'appareil photo ;)
Réglages d'exposition
Il faut ensuite trouver les réglages qui conviennent, principalement :
- la sensibilité optimale (ISO), celle où on aura le plus de signal pour le moins de bruit
- le temps d'exposition maximal, il dépend de la qualité de la mise en station, il faut donc procéder à tâtons, en augmentant au fur et à mesure le temps, et juger si le filé d'étoiles observé est dû à l'imperfection de la mise en station ou s'il s'agit d'une perturbation exceptionnelle (genre heurter le pied du télescope)
Il est important d'utiliser le format RAW. En effet celui ci enregistre la valeur sur 12 ou 14 bits (soit sur 2^12 ou 2^14 valeurs, soit 4096 ou 16384 nuances), alors qu'un jpeg enregistre sa valeur sur 8 bits, soit 256 nuances. Lors d'ajustements en post-production, il sera bcp plus aisé de récupérer des informations sur un RAW.
dark, offset, flat
Ce sont des prises de vues techniques, qui servent à optimiser les images capturées.
Les dark se prennent avec les mêmes réglages que les images, mais avec un bouchon sur le télescope. On souhaite capturer le bruit dit thermique de l'appareil photo lors de la prise de vue. Ce bruit est lié au capteur de l'appareil photo placé dans des conditions spécifiques: température du capteur qui dépend entre autres de la température ambiante, du temps d'exposition, de la sensibilité ISO… On cherche notamment ce qu'on appelle les pixels chauds dont les valeurs sont complètement aberrantes.
Les offset sont capturés avec le même réglages de sensibilité que les images, mais à la vitesse maximale de l'appareil (1/4000 s). On met en évidence le bruit de l'amplification électronique de l'appareil photo.
Les flat sont pris avec les réglages adaptés, mais avec une lumière uniforme placée devant le télescope. Il s'agit de préparer la correction du vignettage et des poussières.
Traitement des images
Il s'agit maintenant de corriger les images de leurs imperfections avec les dark, offsets et flat, puis de les aligner pour compenser un éventuel décalage, et ensuite de combiner ces photos pour augmenter le rapport signal/bruit, avant de post-traiter l'image résultante pour en tirer sa quintessence.
Pré-traitement
Il faut combiner dark, offset et flat entre eux, puis avec les images. C'est plutôt complexe car les dark eux même doivent être corrigés à l'aide des offset, mais les logiciels guident en général bien l'utilisateur.
Pour simplifier le tout intervient la notion de gamma ou de sensibilité non linéaire de notre oeil à luminosité. En gros, l'oeil est plus sensible aux sombres qu'aux clairs, et ceci selon une courbe d'allure logarithmique. Or les capteurs numériques enregistrent les informations de manière linéaire. Lors du passage en jpeg, la mise à l'échelle logarithmique est effectuée, mais les pré-traitements en astro doivent être effectués en linéaire. Le passage en logarthmique n'est donc pas automatique et il faut le faire à la main sans quoi on observe une image toute noire.
Bref, après quelques tours de passe-passe on obtient en sortie plusieurs images pré-traitées qu'il va falloir combiner entre elles.
Alignement
Malgré une mise en station de compétition, il peut y avoir un léger décalage entre les prises de vues. Avant d'assembler les images pré-traitées, il faut souvent les aligner. Les algorithmes sophistiqués prennent le relais, merci aux matheux pour les avoir développés.
Empilement
Toute la magie s'opère ici, et ceci est la raison de tout ce qui a pu être mise en oeuvre jusqu'ici.
Le bruit restant sur les images est aléatoire. On parle de bruit blanc. Ce qui signifie que sur 2 images d'un même sujet, les valeurs des pixels vont légèrement varier. Si on multiplie le nombre d'images, on obtient des variations autour d'une moyenne, qui n'est autre que l'image non bruitée. En empilant les images, les variations dues au bruit vont se compenser. Et comme tout sujet statistique (calcul de moyenne, bruit blanc), le résultat est meilleur avec un grand nombre d'images. Pour être exact, le rapport signal sur bruit augmente avec la racine carrée du nombre d'images.
Exemple avec 1 image à gauche, 4 images au milieu, et 32 à droite :
Il convient donc d'empiler les images pré-traitées, de multiples algorithmes sont disponibles, allant de la simple moyenne, aux sophistiquées rejet de pixels déviants trop de la moyenne selon des règles statistiques 2, 3 ou 4 sigma…
Post-traitement
On passe ensuite à une étape dite photoshop (ou gimp, hein, pas besoin de payer tout le temps -bien qu'il faille compiler soi-même la version béta 2.9.4 pour avoir un support de couleurs de plus de 8 bits, sans quoi le post-traitement n'a pas d'intéret), où on va utiliser ajuster la luminosité de l'image, en général avec l'outil niveau et l'outil courbe, pour rendre plus lumineux la partie intéressante de l'image sans trop éclaircir le fond de ciel. Ces algorithmes ont comme côté négatif de faire ressortir le bruit, d'où l'importance d'avoir une image la moins bruitée au départ !
Les traitements de réduction de bruit ne sont en général pas nécessaire car l'empilement est plus efficace. En revanche un réhaussement du microcontraste ou de la netteté sont souvent les bienvenus.
Et voilà, on a une astrophotographie prête à être diffusée ! (soupir)